Le professeur François Longin traque les évènements extrêmes en finance

23.1.2017

François Longin, professeur de finance à l’ESSEC Business School, publie un ouvrage en collaboration avec plus de 40 contributeur…

François Longin, professeur de finance à l’ESSEC Business School, publie un ouvrage en collaboration avec plus de 40 contributeurs du monde entier, baptisé « Extreme Events in Finance: A Handbook of Extreme Value Theory and its Applications ». Depuis plusieurs années maintenant, l’enseignant-chercheur s’appuie sur « la théorie des valeurs extrêmes » pour mieux mesurer les risques de marché.

Le Krach boursier à New York en 1929, la bulle internet en 2000, la crise des subprimes en 2007… L’histoire est jalonnée de crises monétaires et financières, ayant impacté plus ou moins fortement l’économie mondiale. François Longin a fait de ces évènements extrêmes la base de ses travaux de recherche. Depuis 1994, il s’appuie sur une ication financière de la théorie des valeurs extrêmes pour mesurer les risques sur les marchés financiers. Pourtant, François Longin n’était pas forcément prédestiné à s’intéresser à cet aspect du monde de la finance. Il faudra la conjonction de deux évènements lors de ses études pour aboutir à cet intérêt. Étudiant à l’École nationale des Ponts et Chaussées, il suit en 1989 un cours de modélisation qui le passionne. « Cet enseignement présentait la théorie des valeurs extrêmes, raconte François Longin. On l’utilisait pour définir la taille des ouvrages pour résister à des évènements extrêmes comme les tremblements de terre ou les tornades. Beaucoup de chercheurs hollandais s’y sont intéressés pour dimensionner les digues, suite au raz-de-marée meurtrier de 1953.»

Quelques mois avant d’étudier cette théorie, il a été confronté, comme le reste du monde, à un krach boursier. Le 19 octobre 1987, la bourse de New York perd 20 % en une seule journée. « Les gens ne comprenaient pas comment un tel évènement était arrivé, explique François Longin. D’où mon intérêt alors pour étudier les évènements extrêmes en finance. » François Longin fait le rapprochement et a alors l’idée d’appliquer la théorie des valeurs extrêmes au monde de la finance. Le virus ne le quittera plus. En 1993, il publie une thèse sur le sujet. « Personne ne l’avait fait avant. Il fallait convaincre tout le monde. Mais le timing était le bon, car la réglementation devenait très importante dans la finance, et dans les années 90, on a cherché à quantifier les risques sur les marchés. »

La possibilité de non pas prédire, mais mesurer les risques séduit. «À un moment en finance, il faut modéliser les choses. La matière première de ce domaine, c’est le risque. Il fallait donc pouvoir le calculer. » François Longin s’appuie sur des bases de données importantes pour établir des statistiques. Le chercheur épluche même la sémantique dans les archives de journaux américains au lendemain de fortes baisses de la bourse pour mieux définir les évènements extrêmes.  Aujourd’hui, l’application de la théorie des valeurs extrêmes ne permet pas de prévoir exactement quand se produira le prochain krach, mais sa période de retour ou la probabilité de sa taille. Une avancée importante : selon les statistiques habituelles, un évènement comme celui de 1987 devrait se reproduire tous les milliards de milliards d’années. En appliquant la théorie des valeurs extrêmes, ce délai passe à 100 ans « seulement ».

François Longin a notamment réuni en 2014 de nombreux experts et chercheurs sur le sujet lors d’une conférence à l’ESSEC sur le thème Extreme Events in Finance. Il mène également aujourd’hui des activités de conseil auprès des banques à propos des valeurs extrêmes, sur les opérations de marché, la réglementation et la gestion d’actifs. Et forcément, on lui prête une oreille attentive. « Pendant longtemps, les évènements extrêmes ont été rejetés par les chercheurs qui les considéraient comme des anomalies dans les données. On peut pourtant en déduire beaucoup de choses, ils apportent énormément d’informations. Il y a un intérêt, les gens vous écoutent. Car si le mot magique en gestion de patrimoine, c’est économie d’impôt, en finance, c’est krach boursier. »

Retrouvez les contributions de François Longin sur ESSEC Knowledge

Un livre pour convaincre les acteurs de la finance

« Extreme Events in Finance: A Handbook of Extreme Value Theory and its Applications » aux éditions Wiley est un ouvrage collaboratif, écrit par plus de 40 contributeurs du monde entier. Des chercheurs mais aussi des professionnels de la banque, des sociétés de gestion de fonds, de compagnies d’assurance ou encore des banques centrales ont contribué à l’élaboration de cet ouvrage. Le livre s’appuie sur l’application de la théorie des valeurs extrêmes dans la finance, mais également sur les expériences des professionnels du monde financier dans leur travail de tous les jours. L’objectif est ainsi de dresser une vue d’ensemble de ces évènements extrêmes, et de la méthode pour les mesurer.

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